LES AUTOBUS DES C.P ( Chemins de fer de Provence)
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Je me souviens encore de ces autocars vert et crème des CP passant sur le boulevard de Strasbourg ou place Noël Blache dans les années 60-70; cette compagnie est l'héritière directe de la Cie des Chemins de Fer du Sud de la France, celle-là même qui exploitait le fameux Macaron, lepetit train du littoral qui desservait la ligne Toulon-Hyères -St-Raphaël... voir les pages consacrées au Macaron .
La Compagnie des Chemins de Fer du Sud de la France fut créée le 3 décembre 1885 par la baron Jacques de Reinach, un banquier allemand naturalisé français en 1871. La ligne fut construite à partir de mars 1888 et s'acheva en 1905 avec l''inauguration de la gare du Sud-France à Toulon. Après de multiples péripéties assorties de scandales politico-financiers, la Compagnie du Sud-France céda sa place à une nouvelle compagnie née le 1er janvier 1925 : la Compagnie des Chemins de Fer de la Provence (CP) sous la présidence de Jacques Stern.
Dans les années 30, une redoutable concurrence allait voir le jour avec l'arrivée de nouvelles lignes d'autocars détenues par des petits transporteurs indépendants. En 1932, un exploitant routier hyérois, M. Picoche, fonde pour exploiter la ligne Toulon -Hyères, une coopérative de propriétaires et conducteurs d'autocars sous le nom de Groupement des Autobus Bleus Hyérois ( bientôt plus connu sous le nom de GABY) .Il deviendra rapidement le grand rival des CP ( voir la fiche sur les cars Gaby et de la SODETRAV)
A partir de mai 1935, les Chemins de fer de Provence connurent un véritable renouveau grâce à la mise en place des autorails Brissonneau et Lotz en remplacement des locos à vapeur. Le succès fut énorme et mit à mal la concurrence des autocars.
Fin 1936, la compagnie CP racheta à l'entreprise Viale, les lignes routières Toulon-St-Tropez et St-Tropez- St-Raphaël.
Vers 1937-1938, la concurrence s'étiola fortement pour les CP. Sur le parcours Toulon-Hyères, la desserte des cars GABY fut réduite.
C'est à cette époque que les CP prirent le parti de compléter leur desserte ferroviaire par des autocars
Photo E.W Robinson -En septembre 1950, les voies de la gare du Sud-France à la Rode ont disparu définitivement et la verrière abrite désormais les autocars de la compagnie CP. La guerre de 39-45 sera en effet fatale pour l'avenir du train du littoral, les destructions dues aux nombreux bombardements alliés et les grandes difficultés financières des CP précipitèrent la fin de l'exploitation par chemin de fer. A partir de 1947, la compagnie CP fit l'acquisition d'autocars pour transférer progressivement l'exploitation du rail vers la route. Le 14 mai 1948, le verdict du Conseil général du Var tomba, c'en était fini du train du littoral ( en fait le dernier roula le 18 octobre) |
Les autocars couvraient le trajet Toulon -St-Raphaël en 4 heures environ ( contre 2 heures 40 par autorail en 1935)
Photo coll. G.E.C.P - A Fréjus, dans l'emprise de la gare, l'atelier diesel du dépôt fut ravagé par un incendie à l'aube du 19 mai 1948; 5 autocars des CP ( dont 4 Renault 215 D neufs ) qui y'étaient remisés, furent anéantis. Huit moteurs diesel, 4 génératrices, l'outillage et la totalité des pièces de rechange des autorails, furent détruits et ensevelis sous les décombres. L'origine criminelle de l'incendie ne fit aucun doute mais après 6 mois d'instruction, le coupable ne fut jamais trouvé et l'enquête fut close à jamais. A qui profitait le crime ? A ceux qui voulaient tuer le train du littoral, sans nul doute... |
Aux termes de nouveaux accords confirmés par un procès en 1952, la société GABY reprit la totalité de la desserte Toulon-Hyères via Carqueiranne.
Photo José Banaudo - A Toulon, les bureaux de la direction quittèrent la vieille gare du Sud pour s'installer dans un immeuble au 6 boulevard Pierre Toesca. En juillet 1954, les terrains de l'ancien terminus furent expropriés; les restes de la gare du Sud furent démolis dans les mois qui suivirent, laissant la place au futur chantier de construction du lycée Dumont d'Urville. Le nouveau garage des CP fut mis en service en novembre 1955; il était situé dans le quartier au-dessus de la gare de Toulon, chemin des Lices. La direction s'y installa également.
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Ci-dessus à gauche : Photo coll. G. Bonnafoux -Tout début des années 50, devant la gare SNCF de Toulon, un autocar Renault R 4190 et un 215 D. Avant le transfert définitif sur route de la ligne du littoral, les autocars CP partaient et arrivaient devant la gare de Toulon. Ci-dessus à droite photo Marcel Cauvin -coll. G.E.C.P - À partir de 1947, la compagnie CP fit l'acquisition d'autocars pour assurer le transfert par la route: ici un Renault 215 D portant le N° de parc 16 en gare de St-Tropez, photographié en 1948.( voir la fiche sur le 215 D) Remarquer le chauffeur qui pose fièrement, sanglé dans son uniforme et coiffé d'une casquette blanche; à l'époque, on était vraiment très fier de représenter son métier et sa compagnie. Le service routier mis en place par les CP fonctionna sans changements notables durant une trentaine d'années. La tête de ligne fut reportée devant la gare SNCF de Toulon. L'itinéraire fut scindé ultérieurement sous la forme de navettes Toulon-St-Tropez et St-Tropez -St-Raphaël ( ces dernières effectuant la navette de Cogolin) |
Photo parue dans "Le train du littoral"- Ci-contre un autocar Saviem ZR-20N des CP au dépôt de la compagnie à Fréjus en 1978. A l'autre extrémité de la ligne, l'ancien dépôt de Fréjus fut réaménagé pour l'entretien des véhicules. De 1947 à 1950, les CP constituèrent une flotte de 30 autocars : elle fut toujours fidèle à Renault; elle s'équipa des Renault 215 D et R 4190 puis durant les décennies 1960-1970, elle acquit des Saviem ZR-20N ( photo ci-contre) puis des S 45, S 53 ET SC 5 (photo ci-dessous) Cliquer pour agrandir |
Photo José Banaudo- En 1978, à Cavalaire, l'ancienne gare servait de bureau pour le service d'autocars : on peut y voir ci-contre au premier plan, un autocar Saviem SC 5 et au fond un Saviem S 45 à moins qu'il ne s'agisse d'un S 53-M. Tous deux arborent encore la livrée vert et crème de la compagnie des Chemins de Fer de Provence mais plus pour longtemps...
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Les autocars des CP s'affichent au cinéma dans "Et Dieu créa la femme" de Roger Vadim (1956) avec Brigitte Bardot: ici, à gauche, un petit autocar Renault 215 D numéroté 27 - A droite, un autocar Renault R 4192 à pavillon surbaissé numéroté 68 ( remarquer le chauffeur en cravate, blouse et casquette blanche, quel chic à l'époque, ça fait rêver !) |
Toujours dans le même film, ci-dessus le 215 D et à droite le Renault R 4192 ( cliquer sur les 4 photos pour les agrandir) |
La fin des autocars des CP: Finalement, la société GABY, adversaire depuis l'origine de la compagnie CP depuis plus de 30 ans, prit sa revanche en devenant l'actionnaire majoritaire de son concurrent en juillet 1969. La fusion fut définitive à compter du 1er avril 1976, date à laquelle GABY, CP, les Autobus réunis de Draguignan et les Cars Sumian de Marseille, s'associèrent au sein de la Société des Transports Varois dite SODETRAV - Les autocars ex CP continuèrent néanmoins à rouler sous la raison sociale CP et la livrée vert et crème jusqu'au printemps 1978 avant de s'intégrer définitivement au parc SODETRAV.
Photo extraite de la 4è de couv. du livre "La fabuleuse histoire du S 45" -Cette photo n'est pas celle d'un véritable autocar des CP mais je pense que cet autocar Saviem S 45 par ses couleurs rappelle d'assez près les couleurs des véhicules des CP ( vert et crème) La dernière survivance de ce qui avait été la prestigieuse compagnie du Sud-France avait vécu. Depuis le début des années 90, la SODETRAV est intégrée au sein du groupe de transports Via-GTI; à cette occasion, le garage des Lices a été abandonné et le siège transféré à Hyères. A la fin des années 90, le groupe SODETRAV exploitait 6 relations quotidiennes Toulon-Le Lavandou; 8 Toulon -St-Tropez; 8 St-Tropez -St-Raphaël via Grimaud plus 2 ou 3 navettes St-Tropez-Cogolin. (Voir la page spéciale consacrée à la SODETRAV) |
S'y ajoute la desserte Toulon-Hyères héritée des cars GABY, les services urbains d'Hyères et quelques services suburbains exploités en commun à Toulon avec la RMTT.
"1880 -1980: Un siècle de transports en commun dans l'agglomération toulonnaise" par Gabriel Bonnafoux et Albert Clavel - Le train du littoral par José Banaudo aux éditions du Cabri -Photos: collection Gabriel Bonnafoux et photos extraites du livre "Le train du Littoral" - Les passionnés de ce train doivent se procurer absolument l'excellent livre de José Banaudo, la référence absolue en la matière : "Histoire des chemins de fer de Provence , tome 2 : Le train du Littoral "( Les Éditions du Cabri) avec la participation du G.E.C.P ( Groupe d'étude pour les Chemins de fer de Provence) et Raymond Bernardi.- Photos extraites du film "Et Dieu créa la femme" issues du site IMDB : http://www.imcdb.org/
Page créée le 15/03/2005 © Roland Le Corff -Version du 09/06/2021