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AUX DAMES DE FRANCE

Au vrai chic toulonnais

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Les grands magasins sont apparus au cœur des grandes villes au début du 19ème siècle, ils se sont développés très rapidement entre la 2ème moitié du 19ème sècle et le début du 20ème siècle. Le Bon Marché créé à Paris en 1852 par Aristide Boucicaut, est le premier grand magasin qui incarne véritablement cette révolution commerciale et offre un vaste choix de rayons différents sur une très grande surface. Émile Zola s'en est largement inspiré pour son roman : "Au Bonheur des Dames".

A la fin du 19ème siècle, les ouvertures de grands magasins se multiplient en Europe et aux États-Unis :

En France, ce sont : les Grands Magasins du Louvre (1855), À la Belle Jardinière (1856), Les Grands magasins du Printemps (1865), La Samaritaine (1865), Les Nouvelles Galeries (1867), Les Galeries Lafayette (1896),

Aux Dames de France

Tout débute en 1898 par la création par les frères Gompel de la société Paris-France dont le but est de chapeauter toute une chaîne de magasins à l'enseigne "Aux Dames de France". Les Dames de France s'inspirent largement des Galeries Lafayette et du Printemps et ont pour but de les concurrencer directement. Pour tous ces magasins, le concept est de proposer sur un seul et même espace des dizaines de grandes marques de vêtements, de maroquinerie, de bijoux, de décoration et linge de maison, de literie, et bien d'autres...On est dans le commerce de la mode et du vrai chic.

Le premier grand magasin "Aux Dames de France" fut construit à partir de 1907 à Perpignan, à l'entrée de la ville sur la place de Catalogne. Il ouvrira en 1910 et connut un succès immédiat. Les Dames de France s'implantèrent rapidement dans plusieurs grandes villes : Paris, Marseille, Toulouse, Toulon, Hyères,  Clermont-Ferrand, Bordeaux, Bourges, La Rochelle, Angers, Douai, Chambéry, Angoulême, Avignon, Castres, Cognac, Nevers...

Le tout premier grand magasin "Aux Dames de France à Toulon fut bâti en 1904, il était situé près de la place de la Liberté. On le voit ici à l'arrière de la monumentale fontaine de la Fédération (1890)
Carte postale Ed. des Dames de France - Joli dessin montrant l'imposant magasin dans son ensemble, sur la gauche c'est la rue Victor Clappier où se situait le cinéma Fémina ( voir la page cinémas de Toulon), à droite le côté est de la place de la Liberté.

Photo Google Street - Situé au au coin des rues Victor Clappier et de la place de la Liberté, l'ancien bâtiment des Dames de France abrite désormais l'Union Patronale du Var, on reconnaît bien l'ancienne entrée dans le pan coupé de la façade.

Historique des "Dames de France" de Toulon

A partir de 1852, les travaux de modernisation de la ville vont bon train, au centre de la nouvelle ville, donnant sur la place d'Armes (devenue place de la Liberté en 1889) était prévue la construction de la sous-Préfecture mais en 1868 la ville est autorisée à renoncer à la construire sur cet emplacement. Finalement, sur l'espace libre est édifié entre 1868 et 1870, le Grand-Hôtel, fleuron de l'hôtellerie toulonnaise (architecte Mr. Jacques). En 1904, est édifié le magasin "Aux Dames de France" rue Victor Clappier et sur le côté droit de la place de la Liberté.

1912, mise en service du nouveau magasin

Seulement 8 ans plus tard, en 1912, un nouveau magasin plus vaste, dessiné par l'architecte Lamazière, va le remplacer.  Il se situe à l'angle du boulevard de Strasbourg et de la rue Henri Pastoureau. Les travaux débutèrent à partir de 1910. Le bâtiment fut construit sur l'emplacement de l'ancien hôpital maritime. En effet, au début des années 1900, l’hôpital maritime fut déplacé vers le nouvel hôpital Sainte-Anne. La construction eut également pour effet de détruire le cinéma "Garden Cinéma" qui avait été édifié sur l'emplacement de l'ancien mur extérieur de ce bâtiment. Le Garden-Cinéma  bien oublié de nos jours. était probablement le plus ancien cinéma de Toulon. Dans ce cinéma on passait des films bien sûr mais il y'avait aussi des artistes qui passaient dont le célèbre Félix Mayol qui rappelons-le a donné son nom au temple du rugby au coeur de Toulon où évolue notre très cher R.C.T. L'inauguration du nouveau magasin des Dames de France se déroula le 1er octobre 1912.

Jean Linnemer écrit à propos des nouvelles Dames de France : "Immeuble grandiose à l'architecture chargée, à la décoration rococo. Il marque l'ascension triomphale des grands magasins commencée sous le second Empire."

Le Foyer du marin remplacera l'ancien emplacement des Dames de France sur la place de la Liberté en 1918 puis il y'aura divers occupants dont Renault et Priséco  (visibles sur des cartes postales d'avant la 2ème guerre et au début des années 50). Priséco qui était au rez-de-chaussée déménagea ensuite sur le boulevard de Strasbourg.

Pour finir, ce sera le tour de l'Union patronale du Var d'occuper ce bâtiment et elle s'y trouve toujours aujourd'hui (voir 3ème photo à partir du haut)

Le nouveau magasin des Dames de France édifié en 1912, est sans doute un des plus beaux bâtiments de Toulon. Au-dessus d'une des entrées,  située dans l'angle, on peut lire "Entrée libre"- A l'époque il a 3 étages.

La destruction des Dames de France le 11 mars 1944

 Au cours de l'année 1944, un premier bombardement eut lieu le 6 février, Les bombardements suivants eurent lieu les 7 et 11 mars 1944 . Chacune de ces opérations furent menéees exclusivement par les Américains de l'US Air Force à l'aide de bombardiers du type forteresses volantes B17 ou de B 24 Liberators. Contrairement à une idée très bien ancrée, les Anglais ne participèrent à aucun bombardement sur Toulon durant toute la guerre.

Le 7 mars, 60 B 24 Liberators effectuent un raid en vue notamment de détruire les sous-marins Allemands U-Boot, 10 minutes après l'alerte les fumigènes sont mis en action par l'ennemi. Toulon est noyé dans la fumée. Les dégâts dans le port sont peu importants et aucune victime civile n'est à déplorer.

Hélas, les résultats ne sont pas à la hauteur pour les alliés et ils décident d'y retourner bien vite. Les bombardier de L'US Air Force reviennent le samedi 11 mars à 11 heures 50. Le temps est clair et un vent léger souffle de l'ouest. Trois minutes après l'alerte 32 B 24 venant par le nord bombardent l'arsenal, ils sont suivis par une 2ème vague de 70 appareils. La soudaineté de l'attaque n'a pas permis à la population de se rendre aux abris. Il y'aura 71 tués et 130 blessés. Deux sous-marins allemands de type U-boots ont été coulés. A la Seyne/mer il y'eut 10 tués et 17 blessés.

Peu avant midi,des geysers de cent mêtres jaillissent de la vieille darse, les bombes tombent partout en plein centre ville, les flammes jaillissent des immeubles déjà en train de s'effondrer. Les magasins étaient pleins d'employées et de clientes. Les Dames de France furent en quelques minutes un bloc incandescent inapprochable engloutissant les malheureux occupants, Les sapeurs pompiers de Toulon se battent avec courage et opiniâtreté, l'incendie devait durer jusqu'au lendemain.

Les témoins de cette évènement se souviennent encore des papiers enflammés qui virevoltaient tels des papillons de feu dans le ciel en provenance de l'incendie des Dames de France. On aurait dit une neige noire. Dans le même secteur, L'immeuble adjacent fut également détruit et il y'eut de nombreux dégâts aux alentours; le bombardement avait ravagé la grande Poste, l'Hôtel de Ville, le Palais Vauban...les bâtiments du port et les quais du port sont en ruines. Le marteau-pilon américain est passé et une fois de plus, du fait de leur grande imprécision, nos "alliés" avaient tué plus de civils innocents que d'Allemands.

D'autres bombardements suivirent dont celui du 29 avril 1944 puis Les 5 et 11 juillet et enfin le 6 août 1944, on estime que 47% des immeubles de la ville avait été détruite à la fin de la guerre consécutivement aux 8 bombardements qui avaient touché Toulon entre 1943 et 1944.

1950 -1951 La reconstruction 

 En plein centre ville, l’ancien immeuble des Dames de France ainsi que l’immeuble adjacent, victimes des bombardements,  laissent un trou béant de 2000 m2 que la mairie de Toulon souhaite combler au plus vite. Elle tente donc de faciliter au mieux les démarches de la société Paris-France, propriétaire de la parcelle, afin d’accélérer les travaux, et de redonner au boulevard de Strasbourg sa cohérence. Le projet, comprenant un rez-de-chaussée réservé aux commerces, et des étages d’appartements et de bureaux, est confié à un cabinet d'architectes parisiens dirigé par Pierre de Montaut dont les collaborateurs sont Adrienne Gorska, Joseph Lajarrige et Louis Poutu. Le nouveau bâtiment porte le nom de Palais Paris-France. On dit qu'avec ses parois incurvées, il a la forme d'un bateau. Les façades ne sont pas blanches et lisses comme la plupart des bâtiments des années 30 auquel il se réfère, mais recouvertes de carreaux beiges et d’un placage de marbre au niveau du commerce.

L’immeuble, de plan en U, comporte 7 étages sur rez-de-chaussée, il respecte la perspective de l’avenue. En revanche, son horizontalité marquée et la sobriété de ses lignes tranchent avec les façades voisines. Sa façade est rythmée par de larges bandes horizontales, marquant la limite entre les étages. Elle est animée par le seul rythme des fenêtres, et sur l’angle du boulevard, des loggias. Les deux derniers étages, en retrait, comportent des terrasses protégées par un garde-corps métallique. Les façades latérales sont décorées d’un motif de pavés de verre et d’une « frise » de petites ouvertures carrées qui séparent visuellement le magasin des habitations. L’ensemble est dominé par un toit-terrasse. La particularité de cet immeuble réside dans sa cour intérieure qui permet d’offrir plus de lumière aux appartements et d’éclairer le magasin naturellement, grâce à des verrières zénithales. Ce bâtiment détient le label "Patrimoine du XXe siècle en PACA" depuis le 15 mars 2007 (source DRAC PACA)

Le nouveau magasin fut inauguré le 9 octobre 1951 mais avant cela dans l'attente de la fin des travaux, les Dames de France occupèrent provisoirement un bâtiment situé dans le quartier du Champ de Mars du côté de l'avenue François Cuzin juste avant le fort Ste-Catherine (d'après J. Visconti)

Carte postale Yvon - Les Dames de France vues au tout début de leur reconstruction. Par rapport au bâtiment d'origine, l'emplacement est identique mais les lignes se sont modernisées, L'architecture n'a évidemment plus rien à voir avec le magnifique bâtiment d'origine, le béton a remplacé les pierres de taille. La porte d'entrée en angle a été conservée. Il y'a 7 étages désormais et hormis le premier utilisé par le magasin, tous les autres sont destinés aux logements et aux bureaux. Au premier plan, sur le boulevard de Strasbourg, un tramway qui vit ses dernières années de service. (Ils seront supprimés  le 15 avril 1955), on voit déjà les lignes de contact destinées à l'alimentation électrique des trolleybus et l'aiguillage qui permet de rejoindre les bifilaires vers le Mourillon.
Photo La Pie Service aérien - prise du nord-ouest, voici une intéressante vue aérienne sur les Dames de France après leur reconstruction au tout début des années 50. Le point de repère est l'autobus de couleur claire qui stationne devant.
Carte postale Mary - Cette carte colorisée montre le bâtiment vu du côté nord-est, on peut y voir 2 trolleybus du type VBBh sur le boulevard de Strasbourg, celui de gauche s'apprête à bifurquer dans la rue Henri Pastoureau pour desservir la ligne N°3 à destination du Mourillon.

Carte postale La Cigogne - Sur cette autre carte colorisée, on voit mieux l'enfilade des bâtiments et le boulevard de Strasbourg avec 2 trolleybus et derrière eux, un autobus Etoile (bleu)

Les Dames de France changent de nom

 Les Dames de France marcheront très bien jusque dans les années 70; En 1983, le groupe Galeries Lafayette achète la société Paris-France et intègre ainsi les Dames de France dont le nom va disparaître partout en France. Ainsi à Toulon, vers 1985, le magasin change de nom et devient Les Galeries Lafayette et il perdure encore de nos jours sous cette enseigne.

Photo Google Street -juillet 2012 - Les galeries Lafayette vues de nos jours, angle rue H. Pastoureau-Bd de Strasbourg.

Photo Google Street -juillet 2012 - Les galeries Lafayette vues côté boulevard de Strasbourg

Photo Google Street -juillet 2012 - Les galeries Lafayette vues angle Rue H. Pastoureau - rue du Dr Jean Bertholet

Souvenirs, souvenirs

Pour moi, lorsque j'étais collégien à "Peiresc" entre 1962 et 1966, quand les cours finissaient à 11 heures par exemple, la balade en ville était mon petit moment de bonheur. C'était très souvent le cours Lafayette mais les Dames de France constituaient également une agréable visite. Si je me souviens bien, il y'avait 2 niveaux, le sous-sol et le rez-de chaussée. En fait, bien peu de choses m'intéressaient hormis les jouets et surtout les trains électriques. Il faut dire que la majorité des objets vendus dans ce magasin étaient comme son nom l'indique plutôt réservés aux dames. Je confirme que j'ai les mêmes souvenirs de vitrines animées et de trains miniatures qui tournaient dans les vitrines de Noël comme le décrit J. Visconti ci-dessous.

Jacques Visconti se souvient : Je garde comme souvenir des années de mon enfance les vitrines animées de Noël le long de la montée de la rue Henri Pastoureau avec les trains électriques Hornby, JEP et Jouef en Format O puis HO et les Dinky Toys puisque en dehors des articles majoritairement pour Dames, il y avait aussi les jouets entre autres.Les vitrines de Noël,alors n'étaient réalisées qu'à la toute fin du mois de novembre ou début décembre.

Le coin Boulevard de Strasbourg- Rue Henri Pastoureau, le samedi aprés-midi et le dimanche aprés-midi entre 13 h30 et 16 h00 était le lieu de rendez-vous de la jeunesse "chic" toulonnaise (entre 17 et 25 ans)...c'est là que se retrouvaient filles et garçons et se décidaient entre autre les "surboums" !

Photo R. Le Corff-  Voilà le genre de petit train qui tournait dans les vitrines en période de Noël, celui-ci est de la marque Méccano -Hornby, à l'échelle O  (= 1/43), c'est le prédécesseur des trains HO au 1/87 nettement plus réalistes et moins encombrants. Ce train qui a été reçu en cadeau de Noël par mon frère aîné vers 1957, est composé d'une locomotive électrique BB 8051, d'un wagon couvert frigorifique STEF, d'un fourgon à bagages et d'un wagon citerne Primagaz. Les rails sont à 3 files, le rail central conduit le courant et la loco capte le courant 12 volts continus par l'intermédiaire d'un frotteur. Tout le matériel est en métal (zamac pour la loco, tôle peinte et sérigraphiée pour les wagons) . Ces trains étaient souvent vendus en coffrets complets. Leur solidité était incomparable.

 


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Remerciements : Tous mes chaleureux remerciements à Jacques Visconti et à Maurice Alérini pour leur contribution aux illustrations.

Sources : Wikipédia, TPM-Vistoria, Archives nationales Ministère de la Culture - Site officiel de la ville de Toulon : http://www.toulon.fr/ - Gabriel Bonnafoux "Un siècle de transports en commun dans l'agglomération toulonnaise 1880-1980" - Georges Blond "Rien n'a pu les abattre" - Paul Gaujac "La guerre en Provence: 1944 - 1945 ; une bataille méconnue" - Jean Linnemer "Toulon autrefois" - Antoine Boncompagni , Alain Pellegrino, Gérard Piasco "Histoire des sapeurs pompiers de Toulon"- Jean Rambaud, Tony Marmottans, Gabriel Jauffret "Ca s'est passé à Toulon et en pays varois" -Documentation Eve Roy, 2006 DRAC PACA (Direction Régionale des Affaires Culturelles de la Région  PACA-CRMH ) - Photos : Cartes postales diverses , collection Roland Le Corff et en provenance de Jacques Visconti. Photo Maurice Alérini. Photos de rue,  contemporaines Google Street.

©   Roland Le Corff  2013 -  Page créée le 25/06/2013- Version du 07/03/2021